Sauver le Racou

Les intervenants

Depuis 20 ans, l’ASR alerte la commune, les services de l’Etat et les médias sur la disparition programmée du village de sable du Racou. Laisser disparaître le Racou, c’est amputer Argelès-sur-Mer, le département des Pyrénées Orientales et bien au-delà d’une de ses composantes essentielles sur un plan patrimonial, environnemental et économique. Il serait aujourd’hui souhaitable que cessent les erreurs techniques, juridiques et environnementales qui se sont succédées sur ce site depuis 50 ans et qui le fragilisent.

Etat

Les services de l’Etat menacent régulièrement les riverains d’une nouvelle délimitation du domaine public maritime.  À deux reprises, ils ont dressé des procès-verbaux de grande voirie contre les habitants de première ligne mais, à chaque fois, ils ont été déboutés par le tribunal administratif de Montpellier puis par la cour administrative d’appel de Marseille. Cependant, étant donné l’aggravation de l’érosion, une nouvelle procédure de leur part aboutirait aujourd’hui, selon nos experts, à une expropriation d’environ 80 habitations.

Municipalité

Malgré les engagements successifs, auprès de l’association et des médias, des différents maires d’Argelès, aucune mesure de protection n’a été réalisée.

La municipalité s’engagea en 1998 à protéger la plage du Racou mais sans y donner suite. Elle lança une nouvelle étude en 2001 pour annoncer en 2006 qu’elle abandonnait tout projet de protection, décision à nouveau confirmée en janvier 2017 par le maire, M. A. Parra, sous prétexte que les services de l’Etat s’y opposaient. Nous lui avons alors proposé de lancer ensemble un PAPI (Programme d’Action et de Prévention des Inondations) pour le Racou. Une fin de non-recevoir nous a été opposée

Dans le passé, elle fit systématiquement appel à la société SOGREAH, bureau d’étude grenoblois, qui produisit en 16 ans, 4 rapports (1988, 1996, 1998, 2003) souvent contradictoires, parfois erronés et coûteux et proposé 7 différents projets de protection, sans la moindre obligation de résultat malgré les dépenses engagées.

Durant ces vingt dernières années, elle ne réalisa qu’un seul apport de sable en 2001 . Les autres annonces correspondent à de simples transferts de sable entre la partie nord et la partie sud de la plage. Elle n’a, par ailleurs,  mis en place aucun moyen de protection actif ou passif (épis, butée de pied, ganivelles, ..). Pire, les multiples reprofilages de plage bi-annuels, en déstabilisant la plage, l’ont fragilisé.  La création pour l’hiver d’un « bourrelet » de sable devant les maisons est balayé dès le premier coût de mer. Même en situation d’urgence, il est d’autant plus inefficace que le volume sédimentaire transféré du nord au sud du Racou est très insuffisant pour être protecteur.

La commune proposait d’installer une caméra vidéo sur la colline pour étudier sur trois ans l’évolution de la plage lors des coups de mer. Prévue depuis quatre ans et toujours non réalisée, cette étude reste pour notre association inutile et cet argent (250 000€) pourrait être mieux utilisée pour la protection du Racou.

S’il existait une réelle volonté politique, ceci malgré la complexité du dossier, la protection du Racou pourrait être réalisée en moins de deux ans.  Nous avons toujours souhaité travailler en pleine confiance avec la Mairie d’Argelès. Malheureusement, les engagements, en particulier ceux de ré-ensablement de la plage, n’ont jamais été tenus.

Indépendamment même d’une responsabilité quelconque des digues portuaires, la commune d’ARGELES SUR MER doit choisir aujourd’hui entre la protection et la disparition du Racou. Le laisser-faire actuel ne peut perdurer. L’absence de protection de la plage entraînerait la disparition du vieux village du Racou à la suite, soit d’une nouvelle tempête exceptionnelle, soit d’une mesure d’expropriation pour atteinte au Domaine Public Maritime. Le « recul stratégique », c’est-à-dire l’expropriation de fait et sans indemnisation touchera tout le vieux village (soit, à terme, 4 rangées de maisons) et pas seulement les maisons de front de mer.

Ne pas traiter le problème, c’est accepter – sinon vouloir – la disparition de l’ensemble du vieux village du Racou.

En conséquence la commune doit clairement prendre position sur les mesures de long terme qu’elle envisage de prendre pour assurer l’avenir de cet espace d’exception

Collectivités territoriales de “ rang supérieur ”

Il entre dans les compétences du Conseil Général des Pyrénées-Orientales et du Conseil Régional, tous deux concernés par la gestion du littoral, d’assurer la sauvegarde et la restauration du site du Racou, richesse naturelle, touristique et donc économique du Roussillon.

Aujourd’hui, le Conseil Régional d’Occitanie considère le littoral comme une priorité et veut investir massivement (1 milliard d’euros) dans le « Plan littoral 21 » qui a pour objectif « la requalification de l’offre touristique, le développement des activités économique et la préservation des richesses naturelles du littoral ».

La création du Parc Naturel Marin du golfe du Lion confirment cet objectif.

Depuis 4 ans la communauté « Perpignan Méditerranée Métropole » a lancé un important programme d’étude et de protection contre l’érosion du littoral allant de Canet à Port Barcarès ; La commune d’Argelès n’y participe pas.

Association pour la Sauvegarde du Racou

Cette association créée en février 1996, a toujours eu une attitude citoyenne, à la fois responsable et constructive. Son seul but est la protection d’une des rares plages authentiques et originales du Roussillon qui n’a pas subi d’urbanisation massive.  Elle a financé, elle-même, plusieurs études pour déterminer les causes de l’érosion et les moyens de protection à mettre en œuvre.

Elle a été assistée par deux experts indépendants, de réputation internationale : R. Bonnefille, professeur d’Hydraulique Marine à l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées et à L’INSTA à Paris et  JP. Barusseau, professeur de Sédimentologie à l’Université de Perpignan.

Ainsi, le Racou, bien que site classé, reste la seule plage du Roussillon à n’avoir jamais bénéficié de travaux de protection à la différence de Sainte-Marie, Port Barcarès, Saint Cyprien, Canet, Leucate, Torreilles… Toutes ces communes littorales, qui, pourtant, ne sont en rien des sites classés, ont su sauvegarder leur littoral : apport massif de sable, géotubes, épis, ganivelles, etc… Tout a été fait pour protéger le capital touristique du Roussillon, excepté au Racou. A titre d’exemple, un phénomène identique (la construction des digues du Port de Saint-Cyprien) ayant provoqué l’érosion de la plage au Nord des digues, la municipalité avait alors immédiatement réalisé un ouvrage de protection pour protéger les habitations riveraines.

Aucune autre commune du littoral roussillonnais ne laisse ainsi son patrimoine et son capital touristique à l’abandon

Nous rappellerons, en conclusion, une phrase d’Yves Hoffman, écrivain et amoureux du Racou, qui, en 1996, écrivait dans « L’Indépendant » :

« Pour tout ce que représente le Racou d’original dans cette côte qui tend à se dépersonnaliser, je souhaite que les problèmes soient réglés avec, tout simplement, un peu d’amour du pays… »  

Qui peut intervenir et comment ?

  1. La commune d’Argelès doit avoir une stratégie de long terme sur l’avenir de son territoire : quels atouts (et quelles contraintes) présente le site du Racou ? Quel projet de long terme ? Comment l’inscrire dans les documents d’urbanisme ? Quels moyens raisonnables, et à quel rythme la commune peut-elle lui affecter, etc. La réponse donnée par M. le Maire : « Nous n’avons pas d’argent et la protection du site relève de l’Etat seul » est insuffisante et irrecevable. Il s’agit à la fois de la pérennité d’un joyau de la commune et de la sécurité et de l’avenir d’une centaine de maisons implantées depuis près d’un siècle pour certaines. Rappelons que  le SCOTT Littoral Sud comporte deux enjeux importants :
  • Préserver et mettre en valeur les espaces naturels, les paysages et le patrimoine local, vecteur d’identité et d’attractivité des territoires.
  • Assurer la protection et la mise en valeur du littoral, support d’activité touristique et vitrine du territoire.

2. L’État gère la politique du littoral ; il s’appuie sur le droit, particulièrement celui de la définition du domaine maritime et celui fixé par la loi littorale. Mais s’il intervient en droit et dans l’intérêt commun de la nation, l’Etat intervient aussi en réponse aux sollicitations des collectivités territoriales. C’est pourquoi l’initiative première relève de la municipalité et celle-ci a le devoir de :

  • se donner après concertation puis afficher une politique de long terme pour l’ensemble de son territoire, dont le Racou
  • ensuite en négocier les possibilités et conditions (y compris financières) de mise en œuvre avec l’Etat directement concerné par le domaine maritime, par la sécurité des populations et par le respect des lois. Le lancement d’un PAPI pourrait être une solution.

3. Les collectivités régionale (Le Conseil Régional d’Occitanie) et départementale ont un rôle majeur lors du choix des priorités et du planning de réalisation. Le lancement du « Plan littoral 21 », la création du « Parlement de la mer » et, il y a quelques années, du « Parc naturel marin du golfe du Lion » en témoignent.

Le PAPI : De nombreuses communes littorales françaises ont monté un PAPI (Programme d’Actions de Prévention des Inondations)

Un PAPI vise à réduire les conséquences des inondations sur les territoires à travers une approche globale du risque, portée par un partenariat entre les services de l’Etat et les acteurs locaux. Pour mémoire, entre 2003 (date de création de ces programmes) et 2009, c’est près d’un milliard d’euros qui a été mobilisé par les pouvoirs publics pour financer la 1ère génération de ces programmes.

En effet, il s’agit d’une demande d’autorisation auprès de l’Etat de réaliser des aménagements de protection contre les inondations marines. Pour ce faire, et c’est ce que l’ASR  a proposé en janvier 2017 au Maire d’Argeles, Antoine Parra, qui refuse pour le moment se s’engager dans toute sauvegarde du Racou, il faut commencer par saisir un bureau d’étude avec 3 mandats :

  1. faire une modélisation des travaux d’aménagement pertinents pour protéger les propriétés privées (seuil, digue enfoncée dans la mer, murets, etc.). Il suffirait, pour notre cas, d’actualiser les précédentes études de la société SOGREAH.
  2. faire une estimation des frais de construction de tels travaux : déjà évalués de 2 à 3 M€*
  3. faire un audit de l’impact des aménagements sur le PPRI (Plan de Prévention des Risques d’Inondations) existant et le plan communal de sauvegarde avec une estimation du coût financier de leur révision. 

A partir de cette étude, la commune et l’ASR peuvent monter un dossier de PAPI qui comportera 2 volets :

  1. évaluer les travaux à réaliser (aménagements de protection + études à réaliser )
  2.  solliciter le financement

Une fois que le PAPI est monté et après avoir obtenu des fonds, on peut appliquer l’arrêt de la CAA (Cours Administrative d’Appel) de Marseille concernant le Racou en sollicitant l’autorisation de construire des ouvrages de protection contre les crues marines.